Manuel Frattini
du 14 janvier 2005 au 19 février 2005 SEHNSUCHT : désirer ardemment un endroit meilleur, autre part, quelque part...
Dans SEHNSUCHT, je délimite un endroit, un endroit lointain. Où est-ce et comment m’y rendrai-je? Je n’en suis pas tout à fait certain. Manuel Frattini marche parmi les choses. Feuilles de palmier, chandeliers floraux, n’importe quoi qui attire son regard – Frattini se collectionne lui-même. C’est la capacité de transformation de cette structure même qui devient précieuse.
-Volker Bauermeister, Badische Zeitung 2003.
En rangs, en chânes et en réseaux, les observations recueillies par Frattini se répandent en rhizomes sur le mur. Composées de dessins, de peintures, de photographies et d’objets, les séquences narratives qui en résultent semblent infinies. Unissant plusieurs filons de mémoire, leurs fins semblent ouvertes et effilochées.
Ces séquences s’apparentent à une carte de pensées. Détournant le regard d’une seule lecture linéaire, elles restructurent la relation entre le temps et l’espace. Le mouvement concret dans le temps se recouvre du compte rendu fictif d’un voyage (qui n’a lui-même aucune chronologie directe). Interrogeant les liens entre ce qu’on a vu et ce dont on se souvient par le processus d’emmagasinage et la compression de documents visuels, les scénarimages de Frattini parlent d’une quête : de ce qu’on a observé et retenu, d’un voyage. Il s’agit du désir ardent de trouver un endroit meilleur, autre part, quelque part : SEHNSUCHT.
- Victoria Tafferner
Afshin Matlabi
du 14 janvier 2005 au 19 février 2005 Anxiety, Apology
Nourrie par une grande anxiété, l’exposition «Anxiety, Apology» [Anxiété, Excuses] explore les formes que peuvent prendre la culpabilité humaine et les réactions à un sentiment de sécurité menacée. Dans I am so sorry that..., une marche silencieuse a cours : la culpabilité humaine accumulée au cours de l’histoire sera lavée par le jet d’eau de la rédemption. Deux projections vidéo exposent la relation d’amour/haine avec les États-Unis d’Amérique et un attachement triste et pénible aux Nations Unies.
Bibliographie
- Elliot, Isaac, «Afshin Matlabi : Anxiety Apology», Vie des Arts, no 198, printemps 2005, p.90.
- Redfern, Christine, «U effin S of A», Mirror, 13 janvier - 19 janvier 2005, p.32.
Karen Henderson
du 5 mars 2005 au 9 avril 2005 The Optica Show
Karen Henderson présente deux nouvelles œuvres réalisées spécifiquement pour la galerie Optica. La projection vidéo intitulée 70 times removed from the original est pour ainsi dire une animation qui a débuté par une diapositive en couleur d’une partie du mur est d’Optica. Un double en couleur a été fait de cette diapositive; puis on a fait un double de ce double; puis le double doublé a été doublé, et ainsi de suite jusqu’à l’obtention de 69 diapositives incluant l’originale. Ces images ont été numérisées dans l’ordinateur et réunies les unes à la suite des autres pour donner un film : une série d’images montrées successivement à une vitesse qui donne l’illusion d’un mouvement dans l’espace. Concernant la raison pour laquelle il y a 69 images plutôt que les 70 évoquées par le titre, Henderson dit : «Je voulais faire référence à l’écart initial qui existe entre regardeur et regardé.»
40 consecutive photographs of here constitue un autre type de suite d’images réunies. Celle-ci a démarré avec 40 photographies d’une fenêtre située dans le mur nord d’Optica, lesquelles ont été prises les unes après les autres. «J’ai travaillé au transfert du processus filmique, qui est linéaire, en un processus sculptural, comme un jeu de cartes, dans lequel chaque cadre ou photographie est déposé sur une couche transparente et empilé de façon à ce que voyiez tous les cadres en même temps.» Dans ce cas-ci, une série d’images est montrée de manière à produire l’illusion d’un arrêt dans le temps. Je crois qu’au cœur de ces deux œuvres réside l’impression d’une temporalité radicalement stratifiée et radicalement fluide – temps de la documentation, temps des divers processus matériels et temps des processus perceptuel et réflexif du regardeur, qui se jouent tous sur le terrain commun de la galerie.
- Martin Arnold
Bibliographie
- Delgado, Jérôme, «Traces majeures», La Presse, 27 mars 2005, p.17.
- Lemarche, Bernard, «Le temps découpé», Le Devoir, 2-3 avril 2005, p.E7.
- Olanick, Natalie, «Jeux de miroir», CV ciel variable, no 68, août 2005, p.41.
- «Karen Henderson : The Optica show», Scans, vol. 3, no 2, 24 mars 2005, [www.photobasedart.ca].
Jean Dubois
du 5 mars 2005 au 9 avril 2005 Les Errances de l'écho
Entre certaines personnes, il s'installe parfois une forme de relation insolite tenant autant de l'échange tacite que du dialogue de sourds, une situation qui semble suggérer autant une complicité ludique qu'une tension ambiguë. Avec «Les Errances de l’écho», je souhaite proposer ce type d'expérience à l'aide d'un miroir réagissant aux caresses des spectateurs. Au gré des mouvements, la chose laisse entendre un enchevêtrement de voix qui se croisent et se superposent. Parmi les répliques de vis-à-vis invisibles, on retrouve tout un répertoire de remarques indulgentes ou culpabilisantes, de souvenirs passagers, d'hésitations, de justifications, de creux ou de montées de solitude, d'élans de fierté, de remises en question, de clins d'œil complices. Cette mise en scène sinueuse esquisse ainsi une forme de communauté d'esprit où l'on peut tantôt se reconnâtre par concordance, tantôt y découvrir des nuances divergentes qui peuvent s'avérer intrigantes. Sans effacer nécessairement la symbolique narcissique du miroir, l'approche vise surtout à comparer des monologues intimes, des traits communs ou des soucis partagés. Le dédoublement des apparences individuelles sert alors de canevas à un jeu de concomitances entrechoquant les ressemblances et les dissonances.
- Jean Dubois
Bibliographie
- Crevier, Lyne, «Jeux de miroir», Ici, 17-23 mars 2005, p.27.
- Delgado, Jérôme, «Traces majeures», La Presse, 27 mars 2005, p.17.
- Lemarche, Bernard, «Entre sons et abstractions», Le Devoir, 22-23 janvier 2005, pp.E8-E9.
- Lemarche, Bernard, «Le temps découpé», Le Devoir, 2-3 avril 2005, p.E7.
Gun Holmström
du 22 avril 2005 au 28 mai 2005 In the Raw
Il y a plusieurs années, j’ai assisté à une conférence durant laquelle les diapositives présentées n’avaient aucun rapport avec le thème choisi, pas plus qu’elles n’en avaient entre elles. Tout au long de la discussion, j’ai essayé très fort de trouver un lien quelconque, parce qu’il me semblait tout à fait impossible que les images n’aient rien à voir avec ce qui était dit.
Dans "In the Raw", j’ai utilisé une technique semblable. C’est une sorte d’autoportrait, un collage vidéo contenant des séquences et des textes très variés qui ont été puisés dans mon propre environnement. C’est une histoire sur différentes formes de récit, une saga qui parle, entre autres, du spirituel dans le quotidien. En combinant des éléments sans liens apparents, j’ai voulu créer un espace propice aux associations personnelles du regardeur de même qu’aux nouvelles possibilités de récit. Je crois que la diversion est un outil qui permet d’entrâner les pensées dans des directions inattendues.
Les séquences dans Voyeur ont été filmées presque par inadvertance. En été, toutes sortes de gens se retrouvent sur la pelouse devant le Musée d’art contemporain Kiasma à Helsinki. J’étais assise au quatrième étage et je me suis mise à filmer les gens qui profitaient du soleil, tout simplement parce que la scène était agréable à regarder. Soudain, du coin de l’œil, j’ai remarqué quelque chose de bizarre: un homme, assis là tout seul, qui détonait. Je me suis mise à suivre ses mouvements et des choses mystérieuses ont commencé à se produire. Que disait-il aux filles? Quel objet étrange tenait-il dans sa main? Pourquoi avait-il l’air si déplacé? Voyeur est une histoire qui s’est racontée à moi.
- Gun Holmström
20 avril 2005
Présentation d'artiste
GIV, Groupe Intervention Vidéo
5505, St-Laurent, suite 3015
Montréal (Québec) H2T 1S6
T : (514) 271-5506
F : (514) 271-6950
www.givideo.org
Bibliographie
- Cormier, Réjean-Bernard, «Fable et émotions ineffables», ETC, no 70, juin-juillet-août 2005, pp.8-9.
- Crevier, Lyne, «Soudain l’été dernier», Ici, 12-18 mai 2005, p.51.
Klaus Scherübel
du 22 avril 2005 au 28 mai 2005 Exposition Mallarmé, le livre
4 avril 2005
Colloque
Klaus Scherübel : Introductory Remarks
Monic Robillard : «Entre la chair et l'astre», ou l'idéal en pratique chez Mallarmé
Ian Wallace : «Un coup de dés» and the writing
Hans M. de Wolf : La Voie Lactée comme caisse de résonance métaphysique chez Mallarmé
Klaus Scherübel est né en Autriche et vit présentement à Montréal. Scherübel adopte dans sa pratique artistique plusieurs rôles et fonctions de façon à examiner divers systèmes de production culturelle, allant du domaine des arts visuels et de la littérature jusqu'à l'industrie du spectacle. Son travail, qui comprend objets, photographies, publications, texte et vidéo, a été présenté en Europe et en Amérique du Nord. La «version librairie» allemande (Das Buch) de son projet en cours, Mallarmé, Le Livre, a été publiée par Verlag der Buchhandlung Walther König, Cologne, en 2001. La version anglaise (The Book) a paru chez Printed Matter, Inc., New York, en 2004.
Monic Robillard (Ph.D. Études Françaises) a enseigné à l'Université de Montréal, à Queen's University et à l'UQÀM. Elle a publié Le Désir de la vierge : Hérodiade chez Mallarmé ainsi que Sous la plume de l'ange. De Balzac à Valéry, aux éditions Droz (Genève). Elle est présentement professeur invité à l'École Nationale de Théâtre.
Ian Wallace vit et travaille à Vancouver. En plus de ses activités de professeur en histoire de l'art contemporain depuis 1967, sa pratique en peinture et en photographie a été l'objet d'expositions au niveau national et international depuis plus de trente ans. Plusieurs de ses oeuvres, dont An Attack on Literature (1975), Image/Text (1979), At Work (1983) et Le Livre (1993), font directement référence à Stéphane Mallarmé et à son poème Un coup de dés jamais n'abolira le hasard.
Hans M. de Wolf enseigne l'histoire de l'art et l'esthétique à l'Université Libre de Bruxelles (VUB) et la théorie de l'art à la Kunsthochschule de Berlin - Weissensee (l'École des Beaux-Arts de Berlin). Il travaille à la conception et à la réalisation d'expositions, notamment à la Neue Nationalgalerie im Hamburger Bahnhof, le musée d'art contemporain de Berlin et également avec le Palais des Beaus-Arts de Bruxelles. Il est l'auteur d'une thèse sur le Grand Verre de Marcel Duchamp qui parâtra chez Jacqueline Chambon, Paris.
Bibliographie
- Crevier, Lyne, «Jaquette bleue», Ici, 12-18 mai 2005, p.51.
- Lemarche, Bernard, «Entre sons et abstractions», Le Devoir, 22-23 janvier 2005, pp.E8–E9.
- Mavrikakis, Nicolas, «La musique des mots», Voir, 31 mars 2005, p.55.
- Wright, Stephen, «Reviews / International: Montréal», Art Papers, vol. 29, no 5, septembre-octobre 2005, pp.61-62.
- Wright, Stephen, «Livres et revues, Books and Magazine : Mallarmé, Le Livre», Parachute, no 122, avril-mai-juin 2006.
du 7 juin 2005 au 10 juin 2005 Artexte invite Documents d’artistes chez OPTICA
Depuis sa fondation en 1980, le Centre d'information Artexte a pour mandat de collectionner et de diffuser l'information relative à tous les aspects des arts visuels contemporains. Afin de donner accès aux fruits d'une intense activité en art contemporain et de permettre à ses ressources de constituer un apport essentiel à la réflexion sur les créations artistiques actuelles, Artexte soutient trois modes d'intervention complémentaires, soit la documentation, la recherche et l'édition. [www.artexte.ca]
L'association Documents d'artistes a été créée en 1999 par Christine Finizio et Marceline Matheron. Olivier Baudevin les rejoint l'année suivante. Marine Quiniou y collabore régulièrement. Christine et Marceline pilotent Documents d'artistes, constituent le fonds documentaire et en assurent la diffusion. Olivier et Marine, webmestres, réalisent les dossiers d'artistes et animent le site Internet. Le site [documentsdartistes.org] est en ligne depuis cinq ans. En janvier 2005, un centre de documentation est ouvert à la Friche la Belle de Mai, à Marseille. Sandrine Raquin vit et travaille à Marseille. Sous forme de dessins, de peintures, de photographies ou de vidéos, son travail ressemble à une petite usine de statistiques qui sortirait régulièrement des rapports sur le monde, cherchant des relations ou du sens dans les plis les plus surprenants du quotidien. L'artiste est aussi à l'origine de la création en 1992 de l'association Astérides.
Ce projet d'échange bénéficie du soutien d’Optica, de la convention franco-québécoise, de l'AFAA, de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur et de la DRAC.
Exposition et consultation
Ouvert au public de 13h00 à 19h00, en présence des coordonnateurs du centre de documentation marseillais Documents d’artistes
Conférences
Mercredi 08 juin, 17h30
Jean-Claude Rochefort sur la réalisation d’ouvrages imprimés et multimédias documentant le travail de Raymonde April
Jeudi 09 juin, 17h30
Communication consacrée à Documents d'artistes et à son artiste invitée Sandrine Raquin
Vendredi 10 juin, 17h30
Marie Fraser sur la question de la recherche et du commissariat d’exposition
Jean-Claude Rochefort a été galeriste de 1986 à 1999. Comme critique d’art, il a collaboré au journal Le Devoir (2001-2004) et à la revue Spirale. Il assume depuis septembre 2004 le commissariat de bifurcation, une exposition itinérante de Raymonde April (Prix du Québec Borduas 2003). Il a aussi conçu récemment, pour le compte de Vox, centre de l'image contemporaine, un parcours virtuel sur l'œuvre de Raymonde April. Jean-Claude Rochefort est détenteur d’un doctorat interdisciplinaire en études et pratiques des arts de l’Université du Québec à Montréal. Il se consacre actuellement à l'implantation d'un Centre Art, Nature et Paysage à Saint-Hilarion-de-Charlevoix.
Historienne de l’art et commissaire indépendante, Marie Fraser s’est intéressée, au cours des dernières années, à la question des récits et à l’expérience urbaine, abordant notamment les notions d’espace public et privé, d’identité, de mémoire et de communauté. À titre de commissaire indépendante, elle a organisé plusieurs expositions dans l’espace public dont «La demeure» (2002), «Gestes d’artistes / Artists’ Gestures» (2001) et «Sur l’expérience de la ville» (1997) pour Optica. Elle a été commissaire de l’exposition «Le ludique» (2001), présentée au Musée national des beaux-arts du Québec, ainsi qu’au Musée d’Art Moderne de Lille Métropole, en France en 2003. Elle prépare présentement une exposition intitulée «raconte-moi / tell me» qui sera présentée au Musée national des beaux-arts du Québec et au Casino Luxembourg – Forum d’art contemporain.
Ramona Ramlochand
du 10 septembre 2005 au 15 octobre 2005 White Desert
«La mémoire est à l’un ce que l’histoire est à l’autre : une impossibilité. Les légendes naissent du besoin de déchiffrer l’indéchiffrable. Les souvenirs doivent s’accomoder du délire, de leur propre dérive. Un moment arrêté brûlerait comme un photogramme coincé devant la fournaise du projecteur.»
– Citation tirée d’une des lettres écrites au narrateur de Sans soleil par, semble-t-il, Chris Marker, le réalisateur du film.
Ce projet s’apparente à un délire de moments saisis puis rassemblés dans ma propre histoire (faute d’un terme plus juste), dont l’impulsion naquit dans le Désert blanc, une région du Sahara occidental. Pendant que j’y étais, j’avais l’impression d’être entrée dans le décor d’un film épique, sentiment qui m’accompagne toujours lorsque je suis dans un environnement étranger. Dans pareil environnement, mes pensées ont également tendance à vagabonder vers du familier, du connu, en quête sans doute d’une sorte de normalité dans le chaos du nouveau et l’inconnu.
Ainsi, dans les impressions numériques à jet d’encre de White Desert, le lampadaire devant ma maison (au Canada) devient la lumière qui plane, tel un vaisseau spatial extra-terrestre, sur une inoffensive butte de végétation dans un paysage aride, alors que le jeep blanc symbolise un «lieu sûr» pour le voyage et le tourisme, voire même un «chez soi» (mot porteur, pour moi, de plus de poids et de légèreté insoutenables que je ne suis prête à l’admettre). Dans Triumph : reversing forward, le panneau de bord de la Triumph TR6 est remplacé par un flâneur automatisé. La troisième installation, Maquette for Filmic Moments, reprend les autres œuvres mais à une plus petite échelle, produisant en quelque sorte une épopée plus intime.
Ce corpus d’œuvres cyclique estompe les frontières du lieu et, ce faisant, crée une nouvelle réalité visuelle/géographique. Les pièces fragmentées deviennent les échos d’un lieu qui n’appartient désormais plus à «l’ensemble» mais en fait partie tout à la fois. En retour, ces fragments deviennent des instantanés de l’intériorité d’un sujet qui n’appartient plus à un lieu précis, un sujet «sans frontières», «interpénétré», balayé par les vents de la diaspora.
- R. Ramlochand
Présentée dans le cadre de la 9ième édition du Mois de la photo à Montréal, sous le commissariat général de Martha Langford. «Ramona Ramlochand : White Desert» d’Alice Ming Wai Jim parâtra dans Image & Imagination aux presses de l’Université McGill-Queen sous la direction de Martha Langford et du Mois de la Photo à Montréal.
Bibliographie
- Ardenne, Paul, «Ramona Ramlochand : White Desert», Artpress, no 319, janvier 2005.
- Crevier, Lyne, «Ramona Ramlochand», Ici, 29 septembre - 5 octobre 2005.
- Tousignant, Isa, «Visual», Hour, 1er-7 septembre 2005, p.6.
- Wai Jim, Alice Ming. «Ramona Ramlochand : White Desert», Image & Imagination. Ed. Martha Langford. Montréal : Le Mois de la Photo à Montréal, 2005, pp.53-56.
Cynthia Girard
du 10 septembre 2005 au 15 octobre 2005 Le temps des oiseaux
«J'aime le plancher des vaches.»
– Gustave Courbet
Déjeuner
Dîner
Souper
L'oiseau sur le billot, la boule de laine, le trou.
Je rêve de paysages forestiers
et d'un grand oeil poilu
un oeil soleil qui voit tout
il est poilu comme un sexe femelle
il rayonne sur le paysage décapité
il darde ses rayons
grands cils bruns lubrifiés.
Déjeuner
Dîner
Souper
Il y a un appareil
l'oiseau se repose sur la branche
le paysage est immobile
la balle de laine se déroule
le trou demeure équivoque.
L'appareil nous attend
lubrifié
prêt à couper.
L'homme de billot soupe
il soupe tôt
sandwiches résineux sur fond bleu.
Le fond bleu codéine
mastique les nuages drogués
les nuages paranoïaques
qui n'existent pas.
- C. Girard
Bibliographie
- Tousignant, Isa, «Visual», Hour, 1er-7 septembre 2005, p.6.
Adele Chong
du 4 novembre 2005 au 12 décembre 2005 Close Quarters
M'inspirant en grande partie de mon histoire personnelle, je traite de l’idée du déplacement dans mon travail. Ma famille ayant souvent déménagé, j’ai navigué d’une culture à l’autre pendant pratiquement toute ma vie. Enfant, je tenais un journal et je documentais mes voyages. Cette documentation prenait la forme d’écrits, de dessins ou de bandes dessinées. Bien que les voyages fussent de nature différente, je nourrissais le même enthousiasme envers divers modes d’exploration dans ma documentation, allant des «entrailles» de mon quartier de banlieue aux messages secrets inscrits sur les pavés de Venise. Même si j’étais fascinée par les structures «impossibles», ces exploits architecturaux apparemment considérés de nature divine en raison de leur complexité technique, je privilégiais les espaces plus discrets. Je me sentais attirée par les coins oubliés, les niches, et par tout ce qui évoquait une existence précaire. Bien sûr, cette attirance aux espaces subalternes était également attribuable au fait qu’ils représentaient des issues pour m’évader des structures urbaines rigides, quoique temporaires, qui régissaient mon quotidien. Ces non-espaces constituaient un territoire non revendiqué et, au fur et à mesure qu’ils s’accumulaient, ils composaient un monde sur lequel j’avais le contrôle. Alors que je menais une vie de plus en plus nomade, sachant que la permanence résidentielle serait toujours une impossibilité, des règles inconscientes s’établissaient en prévision d’aménagements ouverts. Un respect tenace pour ces règles ainsi que les implications psychologiques et culturelles d’une vie définie par le rituel contribuent à alimenter ma pratique artistique.
«Close Quarters» a vu le jour lorsque j’ai commencé à produire une maquette pour la salle multidisciplinaire d’Optica. À partir de cette maquette centrale, l’Oeuvre revendique l’espace qui lui a été attribué à la manière d’un enfant : en construisant de petites divisions vulnérables qui affirment fermement leur droit de propriété.
- Adele Chong
Jean-Pierre Aubé
du 4 novembre 2005 au 12 décembre 2005 Elégance - General Electric, circa 1982
Domestication des propriétés sonores d'un électroménager
Depuis quelques années, j'utilise un réfrigérateur de marque General Electric modèle Elégance fabriqué au début des années 1980. Ce frigo occupe l'espace sonore de mon appartement et au fil du temps, diverses altérations mécaniques ont modifié ses propriétés acoustiques.
Pour expliquer les phénomènes captés par les récepteurs de Save the Waves (2004-2005), j'utilisais l'analogie des bruits produits par les réfrigérateurs, objet domestique commun qui vibre au hasard des déclenchements du compresseur. En effet, les appareils électroménagers oscillent à la même fréquence que le système qui lui fournit son énergie, c'est-à-dire 60 cycles par seconde (60 Hz). «Elégance – General Electric, circa 1982» utilise les techniques de sonorisation propres au studio d'enregistrement. Enfermés à l'intérieur de mon réfrigérateur, coupés du monde, des microphones sont disposés à différents endroits stratégiques. Sous haute surveillance, mon frigo fera donc l'objet d'une analyse méticuleuse; ses moindres vibrations seront épiées et amplifiées des milliers de fois.
Dans The Soundscape : Our Sonic Environment and the Tuning of the World (1994), R. Murray Schafer explique que certaines études ont démontré la capacité que nous possédons d'éluder certains sons de notre environnement sonore; parmi eux, on retrouve les vibrations induites par le 60 Hz des électroménagers. Depuis la révolution «électrique», les milieux urbains vibrent à l'unisson de tous ces appareils électriques. Des simples lumières jusqu’aux plus gros générateurs, tous participent à produire un paysage sonore aux harmoniques complexes. Depuis quelque temps lorsque la ville est endormie, j'écoute attentivement mon frigo.
- Jean-Pierre Aubé
Bibliographie
- Lamarche, Bernard, «Machines et créativité», Le Devoir, 27-28 août 2005, p.E10.
le 7 décembre 2005 Lancement de la publication Abus Mutuel : négocier la survivance
Abus Mutuel : négocier la survivance, Optica, Montréal, 2005.
ISBN 2-922085-11-2
Sous la direction de : François Dion et Marie-Josée Lafortune
Auteurs : François Dion, Lori Blondeau, Catherine Grout, Marie-Josée Lafortune, Cuauhtémoc Medina / Francis Alÿs et Jeanne Randolph
Actes d’un colloque interdisciplinaire et performatif, tenu le 16 novembre 2002 dans l’espace Internet et présenté par Optica dans le cadre de sa saison artistique «La survivance», cette publication vise à réévaluer notre rapport aux modèles et au réseau traditionnel de diffusion dans un contexte de mondialisation des marchés. Elle soulève un ensemble de questions sur la pratique de l’art aujourd’hui, tant du côté de sa production et de sa présentation, que de sa réception et de son analyse. Les auteurs ici réunis commentent leurs motivations personnelles et les pressions de leurs milieux pour analyser les conditions d’existence de l’art au travers d’activités critiques et d’initiatives qui génèrent d’autres réseaux et qui proposent des alternatives. La question d’abus étant rarement abordée en art, le présent ouvrage tente d’en démontrer le potentiel subversif.